Note de l’association BeProsumer
Nous avons pleinement conscience de la complexité croissante du secteur de l’énergie, en particulier en Wallonie, où les évolutions réglementaires et technologiques s’enchaînent à un rythme soutenu. Cette complexité est inhérente à la transition énergétique mondiale, européenne, belge et wallonne vers un mix décarboné. Chez BeProsumer, nous avons choisi de jouer notre rôle de chien de garde pour décrypter, comprendre et expliquer ces changements sans en édulcorer la réalité, mais aussi pour analyser l’impact concret de ces transformations sur le statut spécifique des prosumers, afin d’influencer les décisions et de leur permettre de préserver au mieux leurs acquis. Notre objectif n’est pas de simplifier à outrance des sujets complexes, mais de les rendre accessibles et compréhensibles pour que chacun puisse agir en connaissance de cause. Nous préférons informer nos membres avec rigueur et transparence, même lorsque la matière est technique, plutôt que de la résumer au risque de la déformer.
Un contexte de confusion autour d’un possible report
Ces dernières semaines, plusieurs articles de presse ont semé le doute quant à un éventuel report du tarif incitatif – désormais renommé tarif IMPACT – initialement prévu pour entrer en vigueur le 1er janvier 2026. La CWaPE, régulateur wallon de l’énergie, avait en effet demandé aux acteurs du secteur de suspendre la communication sur ce nouveau tarif, le temps de clarifier certaines contraintes techniques évoquées par les gestionnaires de réseau (ORES, RESA) et par certains fournisseurs.
Ce tarif, optionnel et novateur, vise à encourager les citoyens à consommer l’électricité lorsque celle-ci est abondante sur le réseau, notamment en milieu de journée ou durant la nuit. L’objectif : soulager le réseau, réduire les pics de tension et, indirectement, limiter les décrochages d’onduleurs que subissent de nombreux prosumers wallons.
Petit rappel : qu’est-ce que le tarif IMPACT ?
Le tarif IMPACT est une initiative régulée par la CWaPE qui s’appliquera à la composante transport et distributionde la facture d’électricité. Contrairement au prix dynamique, qui suit les variations du marché de gros heure par heure, le tarif IMPACT repose sur des plages horaires fixes :
- Des périodes éco (super heures creuses), où les tarifs sont au plus bas pour encourager la consommation lorsque la production renouvelable est forte.
- Des périodes standard, au tarif intermédiaire.
- Des périodes pic, où les tarifs sont plus élevés pour dissuader la consommation lorsque le réseau est le plus sollicité.

Ce modèle est compatible avec le "principe compteur qui tourne à l’envers jusqu’en 2030" (principe de compensation), ce qui le rend particulièrement intéressant pour les prosumers. Il permet de récompenser la consommation au bon moment sans obliger quiconque à modifier son contrat.
L’adhésion au tarif IMPACT est :
- entièrement volontaire et
- Nécessite l'installation d'un compteur communicant.
(En savoir plus sur le Tarif IMPACT et les prix dynamiques)
La position de BeProsumer : un soutien clair mais vigilant
Chez BeProsumer, nous accueillons favorablement cette initiative du régulateur, car elle va dans le sens d’une consommation plus responsable et plus intelligente.
Le tarif IMPACT représente une opportunité concrète pour récompenser les prosumers et les consommateurs prêts à adapter leurs usages pour mieux consommer l’électricité produite localement, au moment où elle est disponible. (en savoir plus).
Ce comportement, jusqu’ici non valorisé, pourrait contribuer à réduire les surtensions locales et les décrochages d’onduleurs en journée, lorsque les installations photovoltaïques produisent massivement. Il offre également un levier concret pour ceux qui choisissent d’installer une batterie domestique intelligente, capable de gérer automatiquement les périodes tarifaires et d’optimiser le stockage et la restitution de l’énergie en fonction des signaux du tarif IMPACT, maximisant ainsi à la fois l’autoconsommation et les économies réalisées.
⚠️ Toutefois, sans batterie domestique intelligente ou autre gros consommateur électrique "actionnable" pendant les heures ECO (⚠️chauffage), le tarif IMPACT n’est probablement pas une option pertinente pour la majorité des prosumers Wallons. Cette tarification repose sur une démarche volontaire qui suppose une analyse rigoureuse du nombre de kWh « déplaçables » et « non déplaçables » dans le foyer afin d’en évaluer la pertinence.
Pour les plus enthousiastes, il pourrait être plus judicieux de tester le nouveau tarif bihoraire dès 2026 (en savoir plus), notamment si l’objectif est d’éviter l’augmentation de 15 % du tarif monohoraire prévue la même année.

Notre soutien s’accompagne de conditions claires :
- Mise en œuvre progressive et cohérente : nous avons soutenu la proposition d’un lancement au 1er janvier 2026 en régime R3 uniquement, c’est-à-dire avec transmission quotidienne des données quart-horaires, le temps que les GRD et les fournisseurs finalisent leurs développements pour le régime R1.
- Respect du cycle de compensation annuel : nous avons rappelé que, même en comptage R3, la compensation du compteur qui tourne à l’envers doit rester basée sur un cycle annuel. Il ne saurait être question d’une facturation mensuelle.
- Extension du principe de compensation : le compteur doit pouvoir tourner à l’envers sur les trois plages horaires (éco, standard, pic), afin de préserver la logique de la compensation actuelle.
- Transparence tarifaire : pour la lisibilité des factures et la cohérence du système, nous avons demandé que les fournisseurs alignent leurs prix de l’électron (partie « commodity » de la facture) sur les mêmes plages horaires trihoraires que celles fixées par la CWaPE pour le tarif IMPACT.
Note sur le comptage R3 (cliquez pour déployer la note)
Le comptage R1 et le comptage R3 ne concernent que la fréquence et la granularité de transmission des données entre le gestionnaire de réseau (GRD) et le fournisseur.
Par défaut, le compteur communicant enregistre toujours les données quart-horaires et les envoie au GRD.
En R3, ces données sont transmises chaque jour au fournisseur, tandis qu’en R1, seuls les index annuels sont communiqués, comme dans le système actuel.
Nous exhortons donc les fournisseurs à se préparer dès à présent à proposer un véritable tarif trihoraire reflétant fidèlement les trois plages définies par le régulateur.
Au niveau des GRD, nous avons encore certaines questions techniques concernant le déploiement du nouveau registre « ECO » au sein des compteurs communicants, alors que nous sommes à deux mois du lancement effectif de cette nouvelle tarification. Nous cherchons notamment à savoir si l’ensemble des compteurs communicants seront mis à jour pour intégrer les trois tarifs (T1, T2, T3) ou si cette mise à jour concernera uniquement les utilisateurs optant pour la tarification IMPACT. Nous avons également sollicité RESA afin d’obtenir des précisions sur plusieurs points cruciaux pour les prosumers : le mode de mise à jour des compteurs (à distance ou sur site), la visibilité des trois tarifs sur l’écran du compteur ou sur les portails clients, la compatibilité du message P1 avec les nouveaux registres T1/T2/T3, ainsi que la méthodologie de comptage entre les tarifs incitatifs et les régimes actuels à travers les différents registres de prélèvement et d'injection.
Ces éléments sont essentiels pour garantir une transition fluide et éviter toute mauvaise interprétation des index ou des données enregistrées par les outils connectés (dongles, plateformes comme OpenWatt, Home Assistant, etc.). La transparence technique sur ces aspects est déterminante pour que les prosumers puissent suivre précisément leur consommation, leur injection et le bon fonctionnement de leur cycle de compensation.
Une confirmation officielle : le tarif IMPACT bien en vigueur dès 2026
Lors de la Commission Énergie du Parlement wallon du 7 octobre 2025, la ministre Cécile Neven a été interpellée sur le risque de report du tarif incitatif. Dans sa réponse, elle a tenu à rassurer formellement :
« La tarification incitative, désormais appelée tarif IMPACT, entrera bien en vigueur le 1er janvier 2026. (...) La tarification sera assurément disponible pour les clients en régime R3 dès le 1er janvier 2026. Pour certains GRD, la disponibilité en régime R1 sera garantie au plus tard le 1er janvier 2027. »
La ministre a confirmé que la CWaPE pourra mettre en demeure tout gestionnaire de réseau qui ne respecterait pas les dispositions convenues. Elle a également précisé que la communication officielle sera pilotée conjointement par la CWaPE, le SPW, les fournisseurs et les GRD.
La ministre a par ailleurs confirmé s'être concertée avec BeProsumer, notre association, afin de recueillir notre avis et de relayer nos conditions concernant la mise en œuvre du tarif IMPACT. Nous avons ainsi pu présenter les éléments essentiels garantissant une application équitable pour les prosumers, notamment sur la question du maintien du compteur qui tourne à l’envers, du respect du cycle annuel de compensation et du tri-horaire.
En conclusion : une évolution structurante à suivre de près
BeProsumer salue la confirmation de cette entrée en vigueur maintenue et se félicite que les discussions constructives menées entre le cabinet de la ministre, la CWaPE et notre association aient permis d’assurer la cohérence technique et réglementaire du projet.
Nous invitons toutefois nos membres et l’ensemble des prosumers wallons à la prudence : avant de souscrire à la tarification IMPACT, assurez-vous que votre fournisseur propose bien un vrai trihoraire, où le prix du kWh diffère selon les trois plages horaires définies par la CWaPE.
Si vous décidez de franchir le pas vers cette nouvelle tarification, il est impératif de demander le changement au plus proche de la date habituelle de votre relevé d’index ou de registres. Cela permet de ne pas perturber le cycle de compensation annuel (en savoir plus) et d’éviter toute perte financière liée à une rupture de ce cycle, qui pourrait se traduire par des centaines voire des milliers d’euros de différence sur la facture finale.