Revue de presse

Photovoltaïque : piloter collectivement son énergie pour éviter les décrochages (interview BeProsumer)

22/08/2023 - BENOÎT JACQUEMART - SUDINFO

Des batteries intelligentes installées chez les particuliers des quartiers en décrochage, pilotées par un opérateur privé et financées par les GRD, en attendant la modernisation du réseau : c’est la solution présentée par Beprosumer début juillet au parlement wallon.

La modernisation du réseau électrique est indispensable pour la transition énergétique. Mais si on peut avoir l’impression que tout semble un peu lointain, il en est qui vivent déjà les difficultés du réseau de façon très concrète. Ce sont les prosumers, ces petits producteurs qui ont installé des panneaux photovoltaïques sur leur toit.


Certains d’entre eux sont victimes de ce que l’on appelle des décrochages. Leur onduleur, cet appareil qui transforme le courant continu des panneaux en courant alternatif pour le réseau se met en panne lorsqu’il y a une production importante de photovoltaïque dans leur quartier, ce qui entraîne une surtension sur le réseau.


L’électricité qu’ils auraient dû produire est alors perdue. Un phénomène qui ne peut qu’augmenter si on n’agit pas, avec le boom actuel du nombre d’installations.

Problème : il n’existe aucune cartographie officielle de ces décrochages. L’ASBL Beprosumer qui défend les intérêts des prosumers, a lancé une cartographie en ligne sur base de ce que lui rapportent ses membres. Elle est pour l’instant réservée aux membres de l’ASBL. Et eux seuls alimentent la carte des décrochages. Début juillet, 1.200 personnes avaient signalé des décrochages. Le phénomène est donc loin d’être anodin.

Chez Beprosumer, on n’est pas trop adepte des compensations financières, on préfère que l’énergie soit produite et utilisée. Lors d’une audition au parlement wallon, voici un mois, l’ASBL a présenté aux députés une série de solutions pour éviter les décrochages ou, en tout cas, les minimiser. Le vice-président de l’ASBL, Remi Thirion, nous en parle.

Onduleur

On peut par exemple mettre à jour les normes techniques d’onduleurs plus anciens. C’est-à-dire
augmenter les limites de voltage sur le réseau qu’un onduleur peut accepter avant de décrocher. Alors qu’un onduleur est censé décrocher quand il y a une tension de 253 volts en moyenne sur une période de 10 minutes, certains sont réglés à une norme de 249 volts. Si on ne veut pas changer d’onduleur (c’est tout de même un budget), il faut faire appel à son installateur ou à un électricien. « Les GRD parlent aussi de la taille du câble entre l’onduleur et le compteur », nous dit M. Thirion. « Ça peut parfois être une question de 1 volt ! »

Réseau

Ici, c’est de la responsabilité des GRD. Par exemple, en adaptant le réseau. Ou en utilisant les
différentes phases, en utilisant la phase sur laquelle il y a le moins de tension. Mais les prosumers ont aussi une responsabilité dans cette connaissance du réseau. « Le compteur communicant aide les GRD à avoir une vision de ce qui se passe sur le réseau », poursuit Remi Thirion. « Le compteur communicant montre le nombre de volts sur le réseau, il permet d’objectiver les problèmes de décrochages vis-à-vis du GRD. »

La solution collective

Ici, c’est une solution que M. Thirion appelle Optiflux, développée par une start-up
liégeoise AZIMUT Energy. « En gros », nous dit-il, « il s’agit d’utiliser l’énergie quand elle est disponible et pouvoir la stocker pour l’utiliser quand il n’y a plus de production. ». C’est un système où la batterie « sent » quand il y a une surtension sur le réseau et que l’onduleur risque de décrocher. La batterie est activée, ainsi que tous les consommateurs de la maison (chauffe-eau, voiture électrique, machines, chargeurs…) pour faire baisser la tension.

Mais cette technologie peut être utilisée à l’échelle d’une rue ou d’un quartier. « On travaille alors par quartiers, pour des personnes qui sont sur une même ligne », précise Remi Thirion. « On peut parler de solutions collectives localisées. » À Marneffe, une batterie est actuellement en test chez un prosumer en bout de ligne. «On voudrait en avoir chez plusieurs personnes, prosumers ou non. Nous voulons prouver que ça fonctionne », dit encore M. Thirion. La solution est en effet alléchante. Les ordinateurs Optiflux communiquent entre eux. Par exemple, on peut imaginer en cas de risque de surtension, qu’on indique aux machines qu’il faut commencer à charger le chauffe-eau du monsieur au numéro 38. Ou la voiture électrique du couple au 43 de la rue.

Pour Beprosumer, il reviendrait aux GRD d’installer et de financer ces batteries chez les clients. La batterie se place à proximité du compteur, elle fait la taille d’une machine à lessiver.

Cette énergie partagée permettrait d’éviter les décrochages et les surtensions.

Concernant Marneffe, une rencontre aura lieu avec Resa ce 29 août...